ARMÉE – La loterie redoutée par la jeunesse thaïlandaise
Chaque année, l’armée procède au recrutement de dizaines de milliers de futurs soldats par tirage au sort. La perspective de passer deux ans sous les drapeaux n’enchante pas la plupart des jeunes Thaïlandais. Surtout, l’éventualité d’être envoyé dans le Sud Thaïlande fait peur à tout le monde.
Au sortir des études, passer plusieurs mois dans l’uniforme d’un soldat stationné dans l’une des trois provinces ensanglantées du sud de la Thaïlande est redouté par la plupart des jeunes Thaïlandais. Pourtant, à partir de 21 ans, un Thaïlandais doit remplir son devoir civique. Seuls sont exemptés ceux qui souffrent de maladie mentale, de carence physique, ou bien encore les transsexuels. S’engager volontairement dans l’armée permet de ne passer que 6 mois sous les drapeaux. Mais beaucoup attendent la loterie annuelle de l’armée pour jouer à quitte ou double. S’ils sont tirés au sort, ils entrent pour deux ans dans l’armée. Si non, ils réussissent à passer entre les mailles du filet. En avril 2011, l’armée avait recruté de la sorte 100.000 personnes.
En avril 2013, elle organise de nouveau ce recrutement aléatoire pour remplir ses quotas. Dans les centres de l’armée, le rituel est immuable. Des jeunes Thaïlandais attendent dans l’angoisse de tirer un papier dans une boite en bois. Rouge, ils sont exemptés. Noir, ils serviront pendant deux ans leur pays, avec une grande chance d’être à un moment donné affectés dans l’une des trois provinces (Yala, Narathiwat, Pattani) à majorité malaise et théâtre depuis 2004 d’un face à face sanglant entre soldats de l’armée régulière et séparatistes musulmans. Le conflit a fait plus de 5500 morts en neuf ans.
Malgré tout, la perspective de devenir militaire ne rebute pas tout le monde. Surtout lorsqu’on vient d’une famille pauvre. La solde mensuelle de 9.000 bahts (250 €) est utile lorsqu’il s’agit de subvenir aux besoins des parents vivant en province. Autre point a-priori positif : un séjour dans l’armée permet de remettre dans le droit chemins les éléments ayant des problèmes d’alcoolémie ou de drogue. Problème : malgré des conditions de vie draconiennes, et un entrainement extrêmement dur, la circulation de substances illicites perdure dans les rangs de l’armée, selon le témoignage d’anciens soldats.
L’armée royale thaïlandaise fait également face à un autre souci : la perception qu’en a la population s’est fortement dégradée depuis les affrontements de 2010 dans le centre de Bangkok qui ont fait 91 morts. Les militaires sont tenus pour responsables de la plupart des décès des civils. Un article de l’AFP paru en avril 2011 rappelait que les cas de corruption sont légion. Tout les moyens sont bons pour les couches les plus aisées afin d’éviter cette conscription par tirage au sort. Voilà deux ans, un joueur de football de l’équipe nationale avait créé la polémique en se vantant sur son compte Facebook d’avoir payer 30.000 bahts (788 €) pour éviter d’être enrôlé. Il était revenu sur ses dires devant le tollé qu’il avait déclenché. Il n’empêche, les autorités l’admettent : elles enquêtent régulièrement sur des cas de corruption liée à cette aléatoire conscription.
[url= [http://www.lepetitjournal.com/bangkok], jeudi 11 avril 2013] [http://www.lepetitjournal.com/bangkok], jeudi 11 avril 2013[/url]